Les pouvoirs du son immersif

Pourquoi travailler à une expérience auditive immersive ? Plusieurs années de travail à de nouveaux formats, de nouvelles techniques ont donné lieu au son immersif que nous connaissons aujourd’hui. Toujours plus accessible et plus impactant pour les auditeurs, le son immersif est en réalité une réelle adaptation à notre perception habituelle.

La cognition aux origines du son immersif

Les premières traces d’une volonté d’immersion par le son remonte à la Préhistoire. Des recherches toujours en cours démontrent que les emplacements de dessins dans les grottes aujourd’hui fouillées dépendaient des échos et des différentes sonorités. Une salle plus grande et sonore renferme plus d’ornements qu’une partie plus exiguë et silencieuse. Cette pratique, l’archéoacoustique, démontre bien que les humains ont toujours été sensibles et guidés par le son lui-même. A la vue des recherches archéologiques les plus lointaines, un lien s’établit très nettement entre sons et rituels.

Puis, l’aspect immersif du son continue de nous accompagner dans la création de notre environnement. Par exemple, dans la construction des temples, le son était une caractéristique majeure pour véhiculer les messages aux personnes présentes. Le son était pensé en lien avec la construction des lieux pour générer des états d’esprit bien particuliers, expliquant des différences acoustiques selon les lieux étudiés et visités.

Sur un aspect plus artistique, les théâtres antiques sont des réalisations tout aussi probantes de l’importance du son dans les constructions. Le voyage sonore est pensé dans la structure même de l’espace. Plus tard, la construction de la salle Wagner à Bayreuth avait pour intention de brouiller la provenance des sons. C’est l’une des premières salles construites sans hauts-parleurs, avec la volonté d’un son immersif.

Il apparaît clairement que le son immersif fait partie intégrante de notre histoire et la construction de notre culture. Alors allons plus loin;
comment tirer profit et mieux comprendre notre relation à l’audio ?

Des expériences sonores plus saines

Aujourd’hui les recherches entre santé et audio continuent d’évoluer vers une compréhension plus détaillée de l’impact d’un son spatialisé sur l’humain. Étant donné que notre cerveau perçoit constamment des sons provenant de toutes parts, nous sommes beaucoup plus réceptifs à des sons spatialisés, pour s’adapter à notre perception habituelle. Le son compressé, en mono ou stéréo, nous demande un effort supplémentaire et impacte forcément notre état de fatigue, de stress et potentiellement d’anxiété selon les études sur l’impact cognitif du son.

Certains formats et certaines fréquences permettent à nos cerveaux de les traiter plus facilement et de notamment réduire le stress. Les recherches autour de la thérapie sonore ne sont pas nouvelles, mais elles évoluent vers une conception plus précise des sons et de leur impact. Ces études peuvent aller jusqu’à la recherche pour les aides auditives pour des personnes ayant subi des pertes d’audition. Depuis le traitement de pathologies mentales à un impact physique, le son immersif continue d’intéresser le domaine de la santé.

Le son immersif est bien plus adapté à l’oreille humaine et plus adapté à notre santé. De manière très concrète : la différence s’entend. Plusieurs statistiques commencent à démontrer une tendance à revenir vers l’audio spatial en priorité une fois testé.
Alors comment y accéder et mettre des mots sur ce qui change concrètement ?

La spatialisation pour être au plus proche du son

La spatialisation audio a pour objectif de donner l’impression d’une immersion totale dans un environnement sonore. Finalement, il s’agit de recréer la réalité de façon artificielle pour s’adapter aux habitudes de notre cerveau. Dans le contexte d’un jeu vidéo, l’immersion est améliorée pour le jeu, en produisant des sons venant de différents endroits pour déclencher des réflexes. Dans le contexte d’écoute de musique, il est plutôt question d’accentuer la connexion à des sons et des voix, de donner une dimension plus intime à l’écoute.

A l’Ircam, l’EsPro, espace de projection phonographique, permet de vivre des expériences sonores immersives, de façon collective. Les représentations ont lieu dans une salle modulable pour s’adapter aux différentes représentations et différents sons. L’acoustique variable donne cet aspect naturel et crédible, par rapport à un haut-parleur dans une chambre anéchoïque. Parce que l’environnement sonore est un ensemble de choses et pas un événement isolé. La spatialisation cherche à positionner les personnes au centre du son.

En définitive, l’impact cognitif du son est tel qu’il n’est même pas nécessaire d’avoir un niveau sonore élevé. Ce qui signifie que la spatialisation sonore permet moins de fatigue, moins de dommages auditifs et agit directement sur la santé des individus. Malgré le fait que le son immersif requiert une technologie de pointe, son objectif est de faire oublier la technique et générer un résultat très simple et accessible.

L’expérience auditive est un domaine attractif pour la recherche, qui permettra toujours plus d’immersion et de nouvelles sensations. L’Ircam travaille d’ailleurs à de nouvelles études sur notre perception multisensorielle, et notamment autour de la cognition spatiale auditive, à travers des expériences entre mouvements et audition pour définir encore plus spécifiquement la perception de notre environnement.

Mathilde Neu & Antoine Petroff